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L’essor de la délégation intégrale des travaux agricoles : vers une transformation du modèle agricole français

Le marché agricole français connaît depuis plusieurs années une transformation profonde, notamment à travers la montée en puissance de la délégation intégrale des travaux agricoles. Ce phénomène, bien que récemment mis en lumière par l’annonce d’InVivo, n’est pas nouveau. Le sociologue François Purseigle, coauteur de “Une agriculture sans agriculteurs”, souligne que cette tendance était déjà bien présente avant que des acteurs comme InVivo ne la prennent en charge.

Qu’est-ce que la délégation intégrale des travaux agricoles ?

La délégation intégrale des travaux agricoles consiste à confier la gestion quotidienne des tâches agricoles, y compris la gestion des cultures, du matériel et des récoltes, à des prestataires extérieurs spécialisés. Ce modèle permet aux agriculteurs de se concentrer sur des tâches stratégiques ou de réduire leur implication dans les opérations sur le terrain.

Le concept se rapproche de la gestion de biens déléguée, que l’on retrouve dans d’autres secteurs comme l’immobilier ou l’industrie. Dans le domaine agricole, ce type de prestation est souvent motivé par le manque de main-d’œuvre, la complexité croissante des réglementations, ou encore l’évolution des modèles économiques qui pèsent sur les exploitants.

InVivo : un acteur majeur qui structure le marché

InVivo, l’un des plus grands groupes coopératifs agricoles en France, a récemment annoncé le développement de son service de « régie » d’exploitations agricoles. En proposant la gestion intégrale des exploitations à ses clients, InVivo confirme l’importance croissante de ce modèle. L’idée derrière cette initiative est de proposer un accompagnement complet aux agriculteurs, de la gestion des cultures à la commercialisation des productions.

Cette annonce reflète une tendance générale vers la délégation des tâches agricoles, mais elle s’inscrit également dans un contexte où les modèles familiaux d’exploitation sont de plus en plus fragilisés. Pour François Purseigle, cette évolution est une conséquence directe des changements structurels qui affectent l’agriculture française. Le modèle de la ferme familiale, autrefois prédominant, doit faire face à des défis grandissants, qu’il s’agisse de l’augmentation des coûts de production, des contraintes environnementales ou des difficultés à attirer une nouvelle génération d’agriculteurs.

Pourquoi les agriculteurs se tournent-ils vers la délégation des travaux ?

La délégation intégrale des travaux agricoles s’impose comme une solution pour plusieurs raisons :

  1. Manque de main-d’œuvre : L’agriculture souffre d’une pénurie chronique de main-d’œuvre qualifiée. Le recours à des prestataires spécialisés permet de pallier ce problème.
  2. Complexité des tâches : La gestion d’une exploitation agricole nécessite aujourd’hui des compétences variées : techniques, administratives, et commerciales. Beaucoup d’agriculteurs préfèrent externaliser ces tâches à des experts.
  3. Réduction de la charge de travail : La délégation des tâches permet aux agriculteurs de lever le pied, tout en assurant le bon fonctionnement de leur exploitation.
  4. Optimisation des ressources : En confiant la gestion de leur exploitation à un prestataire, les agriculteurs peuvent optimiser l’utilisation de leurs ressources (matériel, personnel) et se concentrer sur d’autres aspects de leur activité.

Une menace pour le modèle familial ?

Si la délégation intégrale permet de soulager certains exploitants, elle pose aussi des questions quant à l’avenir du modèle traditionnel de l’exploitation familiale. Pour François Purseigle, l’essor de la délégation des travaux agricoles est révélateur d’une fragilisation de ce modèle. De nombreuses exploitations familiales, confrontées à des difficultés économiques ou à des contraintes de succession, se tournent vers des services de délégation pour maintenir leur activité.

Dans certains cas, la délégation des travaux peut même entraîner une transition vers des modèles d’exploitation plus industrialisés, où l’agriculteur n’est plus au centre des décisions opérationnelles quotidiennes. Cela soulève des interrogations sur la pérennité de l’agriculture familiale en France, un modèle historiquement dominant mais qui est de plus en plus mis à mal.

L’avenir de la délégation intégrale

La délégation intégrale des travaux agricoles semble destinée à se développer davantage dans les années à venir. Des entreprises comme InVivo sont à l’avant-garde de cette transformation, structurant un marché en pleine expansion.

Cependant, il sera essentiel d’observer comment ce modèle s’articulera avec les valeurs et les réalités de l’agriculture familiale. Si certains y voient une opportunité pour moderniser et professionnaliser le secteur agricole, d’autres craignent que cela ne conduise à une perte d’autonomie pour les exploitants et à un éloignement des valeurs traditionnelles de l’agriculture.

 

Le développement de la délégation intégrale des travaux agricoles, bien qu’amplifié par des acteurs comme InVivo, est une tendance qui s’inscrit dans un contexte plus large de transformation du secteur agricole. Ce modèle, s’il apporte des solutions à court terme pour répondre aux difficultés rencontrées par de nombreux agriculteurs, soulève également des questions quant à l’avenir de l’agriculture française. S’agit-il d’une opportunité pour moderniser le secteur ou d’une menace pour la ferme familiale ? Seul le temps nous dira si ce modèle parvient à réconcilier innovation et tradition.

 

Crédits photos : Image de aleksandarlittlewolf sur Freepik, Image de jcomp sur Freepik

Caroline De Salins Kemlin

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